Le magazine Le Monde a publié récemment un article sur la recrudescence des infections sexuellement transmissibles (IST).
Certains parlent d’un « véritable choc de santé publique » (Michel Valette, service des maladies infectieuses de l’hôpital Dron de Tourcoing). Chaque jour, plus d’un million de personnes contractent une IST dans le monde (source : organisation mondiale de la santé (OMS).
En France, l’Institut de Veille Sanitaire (InVS) publie des données alarmantes : syphilis, infections génitales à gonocoques et à Chlamydia trachomatis sont en nette augmentation depuis une dizaine d’années.
Quasiment disparue au début des années 2000, la syphilis serait à présent responsable de plus de 10 000 cas chaque année.
Quant à l’infection uro-génitale à Chlamydia trachomatis, elle toucherait près de 77 000 personnes tous les ans (source : InVS). Les jeunes femmes sont particulièrement concernées par cette infection. Dans la plupart des cas, elle ne donne pas de symptômes. Cependant, non traitée, cette infection peut se compliquer d’une salpingite (inflammation des trompes) et plus tard d’une grossesse extra-utérine ou de troubles de la fertilité (source : InVS).
Ainsi, le dépistage est recommandé aux jeunes femmes consultant dans des structures comme les centres de dépistage anonyme et gratuit ou les centres de planification et d’éducation familiale.
Le relâchement des mesures de protection : une explication possible à cette recrudescence
Le fait que l’infection par le VIH ait bénéficié de traitements efficaces diminuant le nombre de décès a probablement favorisé un relâchement des mesures de protection. On observe notamment un certain rejet du préservatif, particulièrement chez les jeunes.
Une enquête de la Sécurité sociale étudiante et mutuelle SMEREP réalisée en 2015 a d’ailleurs mis en évidence que 43% des étudiants n’utilisent pas systématiquement un préservatif et 14% n’en utilisent jamais.
Enfin, les jeunes semblent avoir peu de connaissances voire des connaissances erronées sur les IST pouvant se propager. Par exemple, un sondage réalisé par Harris Interactive en février 2016 auprès des 15-30 ans révèle qu’un tiers indique comme IST une maladie qui n’en est pas (comme le psoriasis pour 12% d’entre eux). De même, 7 sur 10 ignorent ou interprètent mal les signes d’une IST (brûlure, écoulement, ulcération).
Le Dr François Lassau du CeGIDD (Centre Gratuit d’Information, de Dépistage et de Diagnostic) de Bobigny précise « on voit souvent des jeunes filles penser que la pilule protège des maladies, tandis que des jeunes hommes ont plus peur de la grossesse de leur partenaire que des IST ».
Consensus pour revoir les stratégies de prévention et de dépistage
Les cliniciens, épidémiologistes, ou représentants d’associations (Sidaction) convergent tous pour repenser la prévention des IST vers une nouvelle stratégie plus diversifiée, attractive et pouvant bénéficier de suivis réguliers.
Le dépistage est également un enjeu dans la mesure où ce dernier permettrait de prévenir les complications tardives liées à certaines IST, comme l’infection à C. trachomatis. Dans ce contexte, la Haute Autorité de Santé (HAS) pourrait prochainement réévaluer ses recommandations de prévention et de dépistage.
i-Share et Essai i-Predict
Aujourd’hui, aucun dépistage systématique (par exemple, une fois par an) de l’infection à C. trachomatis n’est encore en place chez les jeunes femmes. Son efficacité sur la prévention des complications de cette infection doit être préalablement étudiée.
Dans ce contexte, l’unité de recherche UMR1181 (B2PHI= Biostatistique, Biomathématique, Pharmacoépidémiologie et maladies infectieuses) de l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) a obtenu un financement pour mettre en place une étude auprès d’étudiantes volontaires de la cohorte i-Share afin de répondre à cette question. Cette étude permettra également d’améliorer les connaissances sur l’infection à C. trachomatis, préalable indispensable à l’élaboration des recommandations.
Plusieurs collaborateurs interviendront dans cet essai dénommé i-Predict dont le Centre National de Référence des infections à Chlamydiae à l’université de Bordeaux (Cécile Bébéar/Bertille de Barbeyrac) ; Arnaud Fauconnier (responsable du service gynécologie obstétrique du centre hospitalier de Poissy Saint-Germain-en-Laye, et directeur à l’UVSQ du laboratoire Risques cliniques et sécurité en santé des femmes et en santé périnatale (Riscq)).
Les Services (Inter) Universitaires de Médecine Préventive et de Promotion de la Santé (SIUMPPS) seront également fortement impliqués dans l’essai, dont le SIUMPPS de l’UVSQ dirigé par le Dr Emmanuelle Mathiot-Vicaigne de l’UVSQ, l’Espace Santé Etudiants de Bordeaux dirigé par le Dr Christophe Tzourio, le SUMPPS de Nice Sophia-Antipolis représenté par Dr Carine Rebouillat-Savy, et deux SIUMPPS parisiens : l’un dirigé par le Dr Christian Regnier (Sorbonne Universités dont Panthéon-Assas et Université Pierre et Marie Curie) et l’autre représenté par le Dr Raphaëlle Badie-Perez (Sorbonne Paris Cité dont Sciences Po, Paris Diderot et Descartes).
Jeunes femmes Sharers, si vous êtes intéressées par ce sujet, surveillez les actualités sur le site i-Share.fr !
BS